Périodes

Extrait

Période 1

Télémaque

Tu entends cet orage ?
Il explose de vie. Tu crois qu’il entend, lui ?
Non, Mentor ! Non ! C’est une affaire entre Ulysse et moi. Tu dis qu’il est un héros, mais en vérité mon père est un lâche.
Regarde.
Regarde ce palais
Le palais sous l’orage. Sous la pluie.
Ruine du palais perdu. En grandissant, j’ai vu les espaces s’atrophier et les murs se rapprocher. L’immense demeure est devenue cet appartement minable enfoncé au hasard dans un immeuble hirsute du quartier de Neuhof.
Ithaque n’est qu’un quartier, tu sais. Un pays à demi-mort pour moi.
Le pays où je traîne l’absence du père.
Car il est parti, Ulysse. Il est parti sans nous, abandonnant sa femme et son fils.
Abandonner. Abandonner. Abandonner.
Ce n’est pas un voyage qu’il a entrepris :
Un voyage sans retour, mon ami, n’est plus un voyage, c’est une errance sans fin, une terrible déroute.
Il a éteint le feu où il était pour en allumer un autre
Ailleurs.
Nous sommes, Pénélope et moi,
Des cendres.
Rien que des cendres.
Il faut remercier Gabriel de Richaud d’avoir su dire si bien un chagrin si rarement exprimé.

M. H.Haumont